Contrairement au bucheron qui abat des arbres en milieu forestier, l’arboriste grimpeur intervient essentiellement en milieu urbain pour les démonter de haut en bas. C’est d’ailleurs pour ses connaissances de l’abatage et du démontage en s’adaptant à tout type de contraintes (sous sol, sol et aérien) et de hauteurs qu’il est sollicité.
Cet article n’a pas vocation à plaider ou pas la pertinence ou la nécessité du démontage de tel ou tel arbre, mais d’expliquer les méthodes et les techniques employées par les arboristes grimpeurs pour effectuer ces opérations en sécurité.


Article Lezarbres en lien avec le sujet : Pourquoi et comment les arbres meurent ?
démontage Sans contraintes : les éhouppeurs de la forêt
En sylviculture, on parle d’éhouppage lorsqu’un grimpeur est amené à supprimer le houppier d’un arbre avant son abattage par le pied. Ceci afin d’éviter d’endommager la grume au moment de l’impact au sol qui pourrait la fendre lui retirant toute valeur marchande.
démontage avec contraintes : Grimpeurs et hommes de pied, une équipe
Les principales contraintes :
- Barrière
- Toiture de maison ou batiment
- Canalisation souterraine
- Fils électrique et téléphonique
- Cabane de jardin
- Véhicule
- Terrasse
- Mobilier
- Voirie
- Végétaux
- Activité humaine
Que se soit pour faire tomber une « grosse branche » ou une partie plus importante de l’arbre (tête, billon, charpentière…), le grimpeur va devoir se faire assister par un homme de pied qui absorbera la chute à l’aide d’un ou plusieurs dispositifs pour que celle ci ne tombe pas directement au sol. On appel cette opération la rétention de charges.

S’il est de coutume que ce soit le grimpeur qui décide « en haut » et donne les consignes « en bas », le recul et la vue d’ensemble de l’homme de pied lui fournit des informations indispensables pour prendre les bonnes décisions (nombre de tour de corde autour du cylindre, signaler que les cordes de travail et de rétention se croisent, qu’un obstacle risque de bloquer la descente de la charge, etc.).
Les taches de l’homme de pied :
- Sécuriser la zone de chantier (plots, rubalise, panneaux de signalisation…)
- Effectuer le plein des tronçonneuses et vérifier leur état général (affutage, tension de la chaine, bon fonctionnement des organes de sécurité…)
- Préparer les cordes et le matériel de rétention
- Sortir les éléments nécessaires aux secours (corde d’accès, affichage de la fiche chantier sur/dans le camion, trousse à pharmacie et pansement compressif accessibles…)
- Échanger et se synchroniser avec le grimpeur sur les différents postes de travail dans l’arbre
- Monter du matériel nécessaire au grimpeur via sa corde de travail (rappel)
- Vérifier que personne n’entre dans le périmètre de chantier pendant les actions de coupe par le grimpeur
- Assurer la rétention et la descente des charges
- Effectuer le redécoupage des charges au sol et leur évacuation de la zone de travail
- Réaliser le broyage des branches de diamètre inférieur à 15/20 cm selon le modèle de broyeur
- Pouvoir rendre compte au chef de chantier de l’avancée des travaux ou de problèmes techniques rencontrés
- Nettoyage du chantier (branches suspendues, râteau, souffleur…)
On le dit souvent et c’est souvent vrai… pour être un bon homme de pied il faut être soi même un bon arboriste grimpeur !
Éléments physiques
La 1ère confusion que l’on fait est de mélanger le poids et la masse…
Le Poids
- Le terme poids désigne une grandeur de la même nature qu’une force ; le poids d’un corps est le produit de la masse de ce corps par l’accélération de la pesanteur ; en particulier, le poids normal d’un corps est le produit de la masse de ce corps par l’accélération normale de la pesanteur ;
- Le nombre adopté dans le Système international des Poids et Mesures pour la valeur de l’accélération normale de la pesanteur est 980,665 cm/s2, nombre sanctionné déjà par quelques législations.
La masse
En physique, la masse est une grandeur physique positive intrinsèque d’un corps. En physique newtonienne, c’est une grandeur extensive, c’est-à-dire que la masse d’un corps formé de parties est la somme des masses de ces parties.
Densité ou masse volumique
La « densité du bois » , que l’on devrait plutôt appeler masse volumique, est le rapport entre la masse du bois et son volume.
On distingue :
– la « densité absolue », peu utilisée, qui est la densité de la masse ligneuse anhydre (bois réduit en poudre et aggloméré), indépendante de l’essence, ρ = 1530 kg.m–3 (densité : 1,53) ;
– la « densité du bois sec à l’air », que l’on appelle densité du bois, est le rapport entre la masse et le volume de l’échantillon conditionné à environ 12 p. 100 de taux d’humidité ;
– l’« infradensité du bois », rapport entre la masse et le volume saturé en eau ou « volume vert » de l’échantillon.
La densité est plus élevée dans le duramen (bois de cœur) que dans l’aubier, en bas de l’arbre plutôt qu’à son sommet, et, pour les cernes, dans le bois d’été que dans le bois de printemps. Elle est plus élevée dans les feuillus que dans les résineux.
Lire la suite de l’article sur Universalis
La densité selon Les essences
Ressource : Le guide des essences de bois – 74 essences pour les choisir, les reconnaitre et les utiliser (Livre PDF)
Densité de différents bois

La forme de la charge
Un des autres critères à prendre en compte avant d’effectuer une rétention est la forme du morceau que l’on souhaite envoyer. En effet, un billon parfaitement cylindrique faisant 1m50 de hauteur pour une masse volumique de 750 n’aura pas la même réaction dans sa chute qu’une charpentière en Y comportant plusieurs branches faisant contre poids.
C’est d’ailleurs pour ce critère qu’il est souhaitable de bien connaitre plusieurs nœuds de l’arboriste et plusieurs techniques de rétention (rétention sur fut, sur charpentière, avec demi clé, à plat, en tyrolienne…) avant de se lancer.
Sur ces points, seule la pratique et l’accumulation d’expérience permettra de s’améliorer. Sur une même essence les réactions peuvent être différentes selon la saison (présence de sève ou non), selon l’état sanitaire de l’arbre (présence de pathogènes ou pas), selon la météo (présence de vent ou pas) et selon vos compétences (maitrise ou découverte).
Éléments Matériels
Même si chaque méthode à ses matériels de prédilection, voici la liste qu’il est bon d’avoir sur ou près de soi lorsque l’on souhaite réaliser des démontages et abatages d’arbres.

EPI
Cette liste se complète avec les EPI et le matériel dans l’élagage déjà évoquée sur Lezarbres.
- Casque
- Anti bruit
- Visière
- Manchettes
- Gants
- Baudrier
- Longe armée
- Fausse fourche étrangleuse
- Système de freinage (prussik, zigzag…)
- Mousquetons triple lock
- Prussik
Non EPI
- Griffes
- Coins
- Rollotube
- Scie
- Élingues petites et grandes
- Corde(s) de rétention
- Mousquetons acier
- Poulie(s)
- Les nœuds de l’arboriste
- Sacs de rangement
Tronçonneuses
A tout ça vient s’ajouter les « outils tranchants motorisés« , oui les fameuses tronçonneuses !
En résumé : les élagueuses dans l’arbre pour la taille, les 50 cm2 sur griffe pour le billonnage du fut et au dessus de 70 cm2 pour l’abattage des grosses quilles. Les guides vont généralement de 33 cm pour les élagueuses à 90 cm pour « les mamans ».

Les marques les plus utilisées : Stihl, Husqvarna, Echo et Dolmar.
Systèmes de freinage
- Tour mort dans un mousqueton acier : très simple et rapide à mettre en place pour assurer un minimum de freinage sur une petite charge.
- 8 italien : comme pour le tour mort il est simple et rapide à installer et permet des rétentions plus importantes.
- Cabestan volant : le 1er vrai système de freinage dédié à la rétention dans l’élagage
- Hulk : le cabestan volant revisité par la société Courant
- Micro cylindre : contrairement au cabestan volant il vient se fixer contre le tronc à l’aide de sangles et permet un meilleur contrôle de la charge.
- Mini Cylindre : même chose que le micro cylindre mais pour les grosses charges
- Winch : le système qui permet non seulement de retenir des charges mais aussi de les remonter
Le tirage
L’objectif
Faire partir une charge dans une direction voulue en soutien d’un abatage ou d’un démontage de toute ou partie de l’arbre.
Cette méthode est très utilisée par les élagueurs pour faire tomber un arbre « en direct » (abattage) lorsque l’environnement le permet et que les contraintes au sol et dans les airs sont métrisables. L’aide d’une corde de tirage accrochée au sommet de l’arbre pendant que l’élagueur effectue l’entaille directionnelle et son trait de scie va permettre de maitriser le départ de la chute de l’arbre sans faire usage de coins plus utilisés par les bucherons dans le domaine forestier.
Le matériel
- Une corde semi-statique
- Un nœud ou un mousqueton acier
La mise en œuvre
- Le grimpeur attache la corde sur la branche ou le fut qu’il souhaite envoyer.
- Il effectue son entaille directionnelle ou ses traits de scie croisés.
- L’homme de pied tire sur la corde pour déclencher la coupe et la chute de la charge dans le sens voulu.

La petite rétention
L’objectif
S’assurer que la charge envoyée sera freinée et retenue avant son impact au sol. Utile pour les « grosses branches » (charpentières)
Le matériel
- Bas : Un système de freinage (tour mort dans un mousqueton acier, 8 italien, cabestan volant ou micro cylindre)
- Haut :Une élingue et une poulie
- Une corde statique avec ou sans épissure
- Utilisation d’un mousqueton acier ou d’un nœud adapté (stilson, bois, cabestan…)
La mise en œuvre
- Installer une sangle connectée à un mousqueton acier sur une charpentière adaptée à la charge à retenir
- Accrocher la corde sur la partie à envoyer
- Faire passer la corde dans le mousqueton (haut)
- Assurer (ou pas) le freinage par un mousqueton acier depuis le sol (bas)
- Couper la charge et la faire descendre
La grosse rétention
L’objectif
S’assurer que la charge envoyée sera freinée et retenue avant son impact au sol même sur de grosse masse volumiques. Utile pour les « grosses sections » (fut)
Le matériel
- Bas : Un système de freinage (mini cylindre, micro cylindre, winch)
- Haut :Une élingue et une poulieUne corde statique avec ou sans épissureUtilisation d’un mousqueton acier ou d’un nœud adapté (stilson, bois, cabestan…)
La mise en œuvre
- Positionnement et maintien du grimpeur au poste de travail avec une longe armée (avec ou sans prussik étrangleur)
- Mise en place, adaptation ou simple vérification de son système de descente rapide (rappel)
- Installation de l’élingue et de la poulie sur le fut à l’endroit ou l’on souhaite couper
- Passage de la corde de rétention dans la poulie et blocage temporaire à l’aide d’un nœud de magicien
- Entaille directionnelle sur la partie à envoyer avec la tronçonneuse
- Mise en place de la corde de rétention avec une ou plusieurs demi clé et un nœud d’arrêt type de bois ou stilson.
- Connexion de la corde au système d’assurage par l’homme de pied et synchronisation visuelle avec le grimpeur (Ok ? Ok !)
- Trait de scie pour envoyer la charge en haut
- Rétention statique ou dynamique par l’homme de pied en bas
- Descente de la charge « en maitrise » (obstacles prévus et imprévus)
- Évacuation de la charge de la zone de travail et renvoi du système au grimpeur
- Retour à l’étape 1
Des exemples
Le billonage
Il s’agit de la rétention que l’on effectue sur le fut une fois toutes les autres parties de l’arbre descendues. La charge est plus dense et les risques de choc plus élevés pour le grimpeur (effet pivert). Pour pallier à ce risque on parle d’assurage dynamique, ce qui signifie que l’on laisse partir la charge en absorbant son inertie avec le système de freinage choisi. Plus ce système aura un effet bloquant (tour mort dans un mousqueton ou 8 italien), moins l’assurage dynamique sera possible.

Pour l’homme de pied, un système de freinage non adapté, voir inexistant, peut avoir des conséquences dramatiques…
Les assistances motorisées
NACELLE
Il y a les pour… et les contre, ou plutôt « les vrais » et « les autres. En clair, lorsqu’elle est possible (accès, environnement, contraintes aériennes, coût, etc.) la nacelle est un outil parfait pour démonter un arbre sans se blesser et s’économiser pour les autres chantiers de la semaine. Mais il est vrai que cette assistance vient retirer l’aspect « cordiste et sportif » que beaucoup vienne chercher dans ce métier. Une chose est sur, même le meilleur grimpeur ne pourra pas rivaliser en terme de qualité de taille avec une nacelle pour les tailles périphérique lors de (re)mise en gabarit, en particulier les gros sujets, mais le débat reste ouvert.
Quand au démontage, lorsque l’arbre est sec sur pied depuis 10 ans ou que son collet est recouvert de champignons lignivores… la nacelle c’est la vie !
grue
La grue est employée lorsque le débit des éléments de l’arbre et l’évacuation du bois risque d’être trop fastidieuse ou chronophage pour l’entreprise. A 300 € HT de l’heure en moyenne, ce choix sera généralement retenu lorsque toutes les autres possibilités se seront révélées infructueuses.
La méthode :
- Le grimpeur grimpe accrocher les élingues (ou chaines) à l’arbre en veillant à ce que la charge soit triangulée le plus possible.
- Le grimpeur fait signe au grutier (signe visuel ou radio) pour qu’il lui descende et attache le crochet de relais au câble de tirage et donc à la future charge (toute ou partie de l’arbre).
- Le grimpeur descend et se positionne au niveau de la coupe à réaliser en contrôlant sa longe armée et le positionnement de son rappel de descente rapide.
- Le grimpeur effectue 2 traits de scie croisés de chaque côté du fut (H=5 à 10 cm pour la charnière)
- Le grimpeur descend de quelques mètres sous la coupe pour se mettre à l’abri et signale au grutier qu’il peut tirer la charge.
- Le grutier fait casser la charnière en mettant sous tension le cable et remonte la charge au dessus des contraintes (maison, bâtiment, route, fil électriques…) pour la déposer sur une zone de « travail au sol » adaptée.
- L’opération recommence au début selon la taille de l’arbre.
Le risque majeur avec la grue c’est de partir avec la charge accrochée à la grue ou pire, la prendre dans la tête alors que le corps est longé sur la partie restante… . Ayant pratiqué plusieurs démontages à la grue, je dirais que ce qui compte vraiment c’est l’expérience du grutier en matière d’arbres ! Il peut avoir des centaines voir des millier d’heures au compteur dans le BTP, soulever de la matière inerte ou de la matière organique vivante n’a strictement rien à voir.
hélicoptère
Le must du démontage mais à 4000 € la demi heure en moyenne, pas étonnant que cette méthode soi très peut utilisée en France, en revanche nos amis Suisses s’en sont fait une spécialité.
La (co)formation continue
Que ce soit dans des écoles ou des centres de formations agréés, il existe de nombreuses entrées pour se former à ces techniques, en revanche rien ne vaut le partage d’expérience entre pair. S’il est risqué de mettre en œuvre une méthode que l’on ne connait que théoriquement le jour ou vous n’avez pas le droit à l’erreur, en revanche rien ne vous empêche de la tester sur un « petit » chantier ou vous avez le temps et que les contraintes le permettent.
Exemple de support de formation aux méthodes et techniques de rétention

Sources de l’article
- Petzl : Élagage : comment démonter un arbre ?
- Hévéa (revendeur)
- Courant (marque)
- Le Memento de l’arboriste grimpeur (livre)
- Wikipédia (encyclopédie)
- La Flore Forestière (livre)
- Youtube (diffuseur vidéo)
